Pouyss
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment : -28%
Précommande : Smartphone Google Pixel 8a 5G ...
Voir le deal
389 €
Le Deal du moment :
Cartes Pokémon 151 : où trouver le ...
Voir le deal

Analyse de Turkish Star Wars

Aller en bas

Analyse de Turkish Star Wars Empty Analyse de Turkish Star Wars

Message par Pouyss Ven 3 Juil - 17:26

Dünyayi Kurtaran Adam
L’homme qui sauva le monde
Turkish Star Wars


Éclaircissements scénaristiques par Pouyss.


Introduction:

Ayant l’indicible honneur de faire partie des rares privilégiés à avoir pu voir ce chef d’oeuvre dans une version sous-titrée en français, il me semble avoir le devoir de contribuer à la culture nanarde francophone (rien que çà!) en vous présentant une analyse partielle de quelques thématiques de son scénario.


Sous-titres:

Tout d’abord, une mise en garde est nécessaire. En effet, vu la qualité des sous-titres, rien ne me permet d’affirmer que la traduction a été bien faite. Je suis donc obligé de supposer qu’elle l’a été, ne parlant pas moi-même la langue d’Atatürk (fondateur de la Turquie moderne).

Si je parle d’une très médiocre qualité des sous-titres, ce n’est pas pour rien. Ainsi, certaines phrases sont incompréhensibles pour le commun des mortels. Un exemple de réplique de Cüneyt Arkin:

Seul un idiot choisirait des femmes mariées à des montres.
On pourrait se dire qu’il s’agit d’une bête faute d’orthographe. Après tout, elles pullulent dans ce film. Rien que les mots “humain” et “homme” ont tellement d’avatars que l’on ne les reconnaît pas toujours: home, hommme, omme, human, umain... Autre exemple, un ordre du méchant sorcier lors de l’assaut final sur la Terre:

Déstruisez le monde!
Ainsi, dans la phrase d’Arkin, on pourrait supposer qu’il parlait de “monstres” plutôt que de “montres”, ce qui collerait mieux à l’ambiance du film. Mais alors, comment sait-il que les femmes et les monstres de cette planète sont mariés? Car rien dans le film ne laisse supposer une telle affirmation. Mystère...

Et pour les irréductibles qui verraient dans cet exemple uniquement de la mauvaise foi de ma part, un petit exercice. Tentez de m’expliquer (en vingt lignes maximum) ce que signifie la phrase suivante. A vos feuilles!

Bien que le Christianisme soit une religion monothéiste, la quête de l’immortalité qui tirait son origine des Mayas et des Aztèques était toujours à l’oeuvre.

Sachez enfin que les acteurs (et la voix off) parlent énormément tout au long du film, ce qui amène souvent à lire une grande quantité de sous-titres. Ainsi, il arrive parfois que pas moins de six lignes de texte se superposent, remplissant la moitié de l’écran. Et comme les répliques s’enchaînent souvent si vite qu’il est impossible de tout lire, pendant que notre Cüneyt international bondit et grimace comme un damné, on ne peut pas dire que cette version sous-titrée rende le film plus accessible, surtout vu ce que nous allons voir du scénario...


Résumé détaillé:

Si vous avez vu le film sans traduction, vous devez avoir trouvé que la voix off du début n’en finissait pas de parler avant la scène de la bataille spatiale. Elle tente d’expliquer les causes et les conséquences de la guerre entre le sorcier et la planète Terre. Voici intégralement retranscrit son discours (ponctuation et orthographe reproduits tels quels):

L’Âge de l’Espace débuta avec les premiers voyages humains vers l’espace et la Lune. L’Âge de l’Espace fut une ère de progrès pour l’humanité. Elle vécut ainsi pendant des millénaires. L’Âge de l’espace s’est achevé, la vie et le temps sont entrés dans l’Âge Galactique. Des centaines de milliers d’années ont passé et les systèmes planétaires se sont fondus dans un système galactique. Les civilisations et l’Histoire appartenaient au passé, l’humanité commença à se contenter d’un mode de vie simple, comme aux premiers âges. Et elle consacra tout son pouvoir à la quête de l’immortalité. En ces temps, les nations, les civilisations, les races et les religions de la Terre se fondirent en une seule entité. Les humains de la Terre ne constituaient plus qu’une seule forme de vie, une seule entité.

La Terre était menacée d’extinction à cause du développement incontrôlé des armements nucléaires. La Terre avait déjà connu des menaces de cette nature dans le passé... Aucune n’avait pu détruire la Terre. Toutefois, dans certains cas, la Terre s’étaient retrouvées désintégrées en plusieurs morceaux. Ces fragments de la Terre étaient devenus des météores. Sur certaines planètes, la vie continuait. Toutefois, la guerre nucléaire s’intensifiait. Dans une soif de pouvoir et de puissance... Tandis que le monde joyeux et beau était ravagé sans discernement... Soudain, il croisa la route d’un ennemi mystérieux et très puissant. Notre monde, formé de matière et d’énergie il y a cinq milliards d’années; Se fragmenta en nuage de poussière sous l’influence des rayons laser de l’Âge Galactique. Qui était cet ennemi? Dans quelle galaxie se trouvait-il?

Les humains n’utilisèrent qu’une seule arme contre cette menace. Ils créèrent une barrière alimentée par le cerveau humain et la force de sa volonté. Un revêtement fait de molécules de cerveaux humains compressés protégeait la Terre. Chaque attaque transformait un peu plus en nuage du poussière la terre qui s’abritait derrière son bouclier. La seule chose qui pouvait franchir la barrière était une arme fabriquée à partir du cerveau et de la volonté humaine. Mais aussi puissantes soient leurs armes, les ennemis de la Terre n’avaient pas de cerveaux. La force du monde et des humains était l’arme la plus puissante de l’infini. Les humains se lançèrent à la recherche de cette ennemi inconnu, mais aucun guerrier ne revint. Les hommes se rassemblèrent, les tribus s’unirent pour tenter de trouver une solution. La seule solution était de trouver l’ennemi et de la combattre. Les deux plus grands et plus forts guerriers turcs se lancèrent dans l’espace avec d’autres humains et déclrèrent la guerre à l‘ennemi inconnu. Certains hommes ne s’impliquèrent pas dans la guerre. Mais chaque homme capable d’analyser la situation avec son imagination et sa raison était déterminé à s’engager dans cette guerre et à la gagner.
Oui, çà fait long, très long... et je vous laisse juger par vous-mêmes de la cohérence d’un tel discours. Heureusement, l’essentiel du film enchaînant combat sur combat, le scénario avance ensuite à un rythme plus soutenu. Le sorcier lance ses vaisseaux contre la Terre, défendue par nos deux Turkish heroes. Au passage, je ne résiste pas à la tentation de vous faire remarquer que tout ce qui correspond à l’Empire dans Star Wars (donc les “méchants”) est utilisé pour les terriens (donc les “gentils”) dans la reprise turque. Et le même “renversement de camps” est opéré pour les troupes du sorcier (le “méchant” turque) qui utilisent les vaisseaux de la résistance (les “gentils” ricains). Seul échappe plus ou moins à cet échange le vaisseau de Ian Solo, qui est utilisé à la fin de la version turque par Cüneyt pour retourner sur Terre (donc, sous la couche de neurones protecteurs). Mais on pourra y objecter qu’il récupère ce vaisseau sur la planète du sorcier et est donc censé appartenir à ce dernier. Bref...

Mais alors que la victoire penche enfin en leur faveur, nos deux héros sont forcés par une obscure force de s’écraser sur une aride planète. Là, ils découvrent d’abord que cette planète à priori étrangère contient des bâtiments issus de toutes les anciennes cultures de l’humanité (d’où les stock-shots de documentaires). Et la population locale est asservie par le sorcier, qui les force à s’entretuer dans des combats de gladiateurs pour se nourrir de leur sang, qui assure son immortalité. Après un massacre nanar d’une bande de gamins hilares dans une grotte infestée de momies en papier mâché et un entraînement devenu culte sur ce site et dans le monde entier, une blonde muette et un gamin attardé se font capturer et le sorcier n’hésite pas à faire chanter les deux héros turques dans une piteuse reconstitution de la taverne de Tatooine.

Et lorsque les deux guerriers du Bosphore se rendent à la base du sorcier, ce dernier exige de Cüneyt qu’il révèle le secret du cerveau humain pendant que son sidekick amateur de femmes et de champagne est séduit par l’épouse du sorcier. Mais aucun des deux ne lâche le morceau, alors le sorcier les torture... A ce moment du scénario, on peut se demander comment Inanç a pu croire que ces méthodes de torture étaient un tant soit peu crédibles (enterrés sous deux centimètres de terreau ou écrasés sous un briquette en mousse), mais on ne s’étonne plus des tortures turques depuis Once Vatan.

Après avoir affronté et vaincu un troll poilu (dont on remarque au milieu du torse les orifices permettant à l’acteur costumé de voir où il pouvait mouliner des bras), Cüneyt s’évade en démolissant tout sur son passage, abandonnant son ami aux mains du sorcier. Celui-ci en profite pour punir son épouse en la faisant vieillir puis en la transformant en araignée. Alors, avec la blonde muette, Cüneyt se rend dans un temple où l’attend le chef de la population locale. Et là débute l’autre long discours du film:

Fils, ceci est la tombe de Hz. Haci Bektasi Veli (note: saint musulman turque dont une courte biographie se trouve ici: http://fr.wikipedia.org/wiki/Haci_Bektas_Veli ). Un sanctuaire qui s’est séparé du monde il y a 1000 années spatiales. Constituant la plus grande tribu et la société la plus enracinée, l’Islam, ta religion, est un symbole de civilisation. L’islam a débuté quand le dernier prophète Hz Muhammed est devenu l’exemple de droiture et d’humanité pour les siècles suivants. Chaque musulman est un messager de l’Islam et un défenseur de la religion. Lorsque les méchants s’éloignèrent de leur dieu et de leur religion, les guerres commencèrent et le monde devint la cible de toutes les forces du mal de l’univers. Ton livre sacré, le Coran qui a été vénéré et lu par les musulmans pendant des siècles révèle tous les secrets du monde, de l’espace... Ainsi que toutes les phases que connaîtront la civilisation humaine et toutes les créatures vivantes ou non depuis la création du monde et jusqu’au jour du jugement dernier.

Ce livre dit que l’Homme doit croire en sa mort comme il croit en sa naissance. La Mort et l’Immortalité... Le monde fut détruit. Alors, auprès d’une montagne de bronze, naquit la 13e tribu. Ces hautes montagnes de bronze protégeaient des radiations. Ils fondirent la montagne. Ils forgèrent une épée et scèllèrent en elle le pouvoir de la montagne. Puis ils descendirent vers les plaines. Les Sages se réunirent et unifièrent le pouvoir des cerveaux des tous les humains éteints depuis des millénaires, puis ils le fondirent avec la bonté et la sagesse dans un seul cerveau. L’épée et le cerveau sont restés sur cette planète qui est un morceau du monde. Et nous sommes ce qui perdurent de la 13e tribu, le sorcier et nous, les Immortels.
Alors, Cüneyt, toujours accompagné de sa potiche, s’en va tataner quelques hommes du sorcier puis arrivent dans un bâtiment qui ressemble furieusement à une chapelle byzantine, et le vieux reprend son discours:

Lorsque les blasphémateurs commencèrent à massacrer les humains croyant en dieu, ceux qui avaient la foi prirent la fuite. Ils construisirent des villes à sept niveaux sous la surface et combattirent les blasphémateurs. Jésus Christ (Issa pour les musulmans et à entendre les dialogues) les menait. Les cités bâties à plusieurs kilomètres sous la surface étaient l’oeuvre de la technologie la plus moderne... Ils vécurent et se reproduisirent... Des centaines de migrants vinrent et s’en allèrent. Ceux-ci leur parlèrent et comprirzent qu’il n’y a qu’un seul dieu.
Puis, Cüneyt parcours le temple et trouve une salle où deux type en tenue dorée poireautent les bras croisés. Cüneyt prend une sorte d’épée dorée en forme d’éclair derrière eux mais ils attaquent. Après les avoir tatanés, Cüneyt prend aussi une petite boîte où se trouve un cerveau lui aussi doré. La blonde déclame enfin sa première réplique du film en expliquant qu’elle ne pouvait pas parler tant qu’un mortel ne se serait pas emparé de ces oeuvres d’art rococo. Mais le sage ne la laisse pas poursuivre et finit son long speech:

Bien que le Christianisme soit une religion monothéiste, la quête de l’immortalité qui tirait son origine des Mayas et des Aztèques était toujours à l’oeuvre. L’humain le plus puissant de ce temps était le Sorcier. Le Sorcier finit par accéder à l’immortalité. Pour lui, l’immortalité était le plus grand des pouvoirs... Le Sorcier ajouta la puissance physique à son immortalité en tuant des humans, usant de sa terrifiante intelligence et aspirant leur sang avec ses tortures et ses atrocités. Le Sorcier et ses disciples étaient immortels. A mesure qu le temps passeraient, ils deviendraient plus vieux, plus laids, mais ils ne mourraient pas. Ceci est la vérité. Le Sorcier veut se venger du monde. C’est la seule chose qu’il désire.
Après un tel coup de théâtre, il ne reste plus à Cüneyt qu’à étrenner sa nouvelle arme sur une bestiole qui se fait passer pour Ali puis sur une bande d’hommes de main de passage. Mais pendant ce temps, le Sorcier tente de soumettre le pauvre Ali, qui résiste grâce à sa fidélité quasi-canine. Une fidélité qui connaît des hauts et des bas car dès que Cüneyt viendra le libérer, Ali l'assommera et lui piquera les deux objets “sacrés” pour aller castagner le sorcier. La raison? Il trouve juste que Cüneyt, qui castagne toute l’armée du sorcier à longueur de film, prend trop son temps et est trop timoré... Après sa trahison, Ali fonce donc voir non pas le sorcier mais le sage (celui du speech sur l’Islam). Heureusement, c’est en fait le sorcier qui s’est grimé en sage et peut ainsi abuser de la crédulité d’Ali pour toucher les deux objets, ce qui semble suffire à le rendre invincible puisqu’il les laisse sur place. Le vrai sage, lui, meurt, on ne sait pourquoi et Ali, furieux, va (enfin!) castagner le sorcier. Mais un piège explose, ce qui met fin a sa participation au film... du moins, après une agonie pathétique et interminable que je vous retranscris ici intégralement:

Ali: Je crois que je suis un imbécile.
Cüneyt: Si tu l’étais vraiment, il n’y aurait pas autant de fille qui te courraient après.
Ali: Tu es trop gentil.
Cüneyt: Je t’aime tellement.
Ali: J’aurai tant aimé que ma fiancée m’aime aussi.
Cüneyt: Les femmes ne parlent pas de leur amour.
Ali: Dis-leur que je les aime toutes.
Cüneyt: Tu leur diras toi-même en regagnant le monde.
Ali: Je crois que je... que je ne pourrais pas revenir.
Cüneyt: Ne me joue pas le coup du “Je vais mourir.”. Cà ne prend pas avec moi, tu sais.
Ali: Tu ne te laisse pas avoir facilement, je sais. Pour toi, je ne mourrai pas...
Bien entendu, il meurt sur ces derniers mots, ce qui met Cüneyt dans une colère titanesque. Il fait alors fondre les deux objets “sacrés” dans un pot en terre cuite, plonge ses mains dans le métal en fusion sans sourciller et en ressort avec des gants dorés. Grâce à cet armement dernier cri, il peut empêcher le Sorcier de “déstruire le monde”, en massacrant son armée, en lui jetant des pierres explosives, en faisant pleuvoir sur lui une pluie de coups de poing et en le coupant en deux. Rien que çà. Là, au moins, on est sûr que le méchant ne reviendra pas se venger, comme dans le premier film américain venu. Et lors du plan final, Cüneyt dit à sa blonde (comme on dirait au Québec), dans une réplique pleine de noblesse: “Je retourne chez moi, là où il n’y a pas de monstre.”.


Dernière édition par Pouyss le Ven 11 Déc - 19:51, édité 1 fois
Pouyss
Pouyss

Masculin Nombre de messages : 213
Age : 42
Date d'inscription : 27/03/2007

Revenir en haut Aller en bas

Analyse de Turkish Star Wars Empty Re: Analyse de Turkish Star Wars

Message par Pouyss Sam 4 Juil - 0:22

Le cerveau humain, l’arme absolue:

Comme vous n’aurez pas manqué de le remarquer, le cerveau tient une part importante dans ce film, non pas qu’il soit tellement sollicité chez le spectateur, mais qu’il en est régulièrement fait référence.

Le premier et le plus étrange exemple de l’utilité du cerveau humain nous est donné en introduction par la voix off. Pour se protéger des terribles rayons laser du sorcier, les terriens ont entouré leur planète (plusieurs fois réduite en morceaux mais toujours là, comme quoi on fabriquait des planètes solides il y a cinq milliards d’années, pas comme maintenant) d’une sorte de bouclier fait de cerveau humain. Qu’entendent-ils par là? S’agit-il d’une couche de neurones ou de cerveaux entiers entassés comme des briques? Ont-ils été prélevés sur des “volontaires” ou sur des cadavres? Ou ont-ils été produits artificiellement? Mais surtout, quelle réelle protection la matière grise pourrait-elle offrir contre des rayons laser?

Plus gênant encore, le sorcier a besoin d’un cerveau humain pour pouvoir passer cette barrière cérébrale. Pourtant, Cüneyt et Ali débarquent sur un planète où se trouvent de nombreux humains (une trentaine en comptant les figurants), de nombreux monstres et un couple de sorciers. Aucun d’entre eux n’a donc le moindre neurone? La réponse négative semble plausible, surtout lorsqu’on voit les monstres attendre leur tour pour prendre leur peignée au lieu d’attaquer les deux héros dans le dos, lorsqu’on découvre admiratif que la blonde a passé les trois quarts du film sans prononcer la moindre réplique en alternant piteusement une expression méfiante et un sourire coincé, et même quand on se dit que les plans machiavélique du sorcier n’ont pas la moindre once de crédibilité.

Lors du grand speech du vieux sage, il dit notamment:

Les Sages se réunirent et unifièrent le pouvoir des cerveaux des tous les humains éteints depuis des millénaires, puis ils le fondirent avec la bonté et la sagesse dans un seul cerveau.
Passons sur l’impossibilité technique de réunir des cervelles décomposées depuis des lustres avec des vertus certes positives mais immatérielles. Mais d’autres questions plus fondamentales se posent à nous. La première, et non la moindre, est: mais bon sang, quel intérêt de s’embêter à créer un gentil et sage super-cerveau dont ils ne se sont jamais servi? Le seul à qui çà a finalement été utile, c’est au sorcier, et je doute que la construction d’un tel objet lui ait été destinée. A la rigueur, l’introduction de cet objet dans le scénario pourrait expliquer le problème posé plus haut: ce n’est pas n’importe quel cerveau humain que le sorcier recherche mais celui-ci en particulier. Celà voudrait dire que le sorcier a bel et bien un cerveau mais pas celui qu’il recherche (d’autant que celui qu’il détient ne semble pas très efficace). Mais dans ce cas, pourquoi torturer deux terriens qui n’ont jamais entendu parler de cet objet sacré et non les autochtones (au lieu de les massacrer pour rigoler)? Et puis, le discours de la voix off introductive est sans appel:

Mais aussi puissantes soient leurs armes, les ennemis de la Terre n’avaient pas de cerveaux.
Donc, le sorcier, sa femme, la blonde, le sage, les monstres et tous les autres habitants de la planète sont privés de cerveau. Mais celà ne résout pas le problème du champ cérébral entourant la Terre, ni n’explique pourquoi c’est en touchant le cerveau doré (et l’épée) que le sorcier devient tout-puissant. Alors peut-être faut-il chercher du côté de la métaphore...


Métaphore à la sauce turque:

La clef de compréhension du film (car il y en a une, j’en suis convaincu) se trouve à mon humble avis dans la métaphore religieuse. Selon le Coran (n’oublions pas que la Turquie est à 90% musulmane), Allah créa trois types de créatures (auxquelles s’ajoutent les plantes et les animaux): les humains, les djinns ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Jinn ) et les anges (Malaikas en arabe: http://fr.wikipedia.org/wiki/Malaikas_%28anges%29 ). Les anges sont des serviteurs soumis à Allah et n’ont aucune liberté de choix, contrairement aux humains et aux djinns. Les djinns furent créés avant les hommes mais s’entretuèrent, et leur seul survivant fut Iblis ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Iblis ). Alors Allah créa les humains (Adam et Eve) et ordonna aux anges et à Iblis de s’agenouiller devant eux. Mais Iblis refusa, arguant qu’il était fait de feu alors que les humains n’étaient faits que de terre. Il demanda alors à Allah la permission de tenter de corrompre les humains jusqu’au Jugement dernier. Allah accepta mais précisa que les bons croyants (les musulmans), guidés par leurs prophètes (et notamment le dernier: Mohammed) sauraient rejeter la corruption d’Iblis. Cette lutte contre la tentation du mal en soi-même se nomme jihad (terme qui est très loin de se réduire à des attentats suicides perpétrés par des fanatiques: ).

On a là rien de moins que le scénario du film. Tel un Mohammed du futur, Cüneyt, accompagné d’Ali (gendre du prophète et une des principales figures de l’Islam), se retrouve dans un monde où les anges, qui se nomment eux-mêmes les Immortels, sont réduits en esclavage par les djinns avec à leur tête un Iblis de pacotille. Telle l’âme, le cerveau humain est la clef de la sauvegarde de l’humanité face aux créatures maléfiques mais risque d’être corrompu par celles-ci. Il faut donc lutter pour mettre fin à ces agressions, dans un jihad sur trampoline qui a converti tant de téléspectateurs médusés. Et la victoire n’est réellement à portée de poing que lorsque le prophète au sourire ravageur renoue avec la parole divine, symbolisée par son matériel en carton-pâte doré (notez bien que le speech sur l’Islam se fait tout au long de la scène de la découverte de l’épée). Il ne reste alors plus qu’à botter l’arrière-train du sorcier Iblis pour sauver l’humanité de la Fin des temps et pour libérer les anges du joug des djinns.

On voit désormais bien que Dünyayi Kurtaran Adam n’est pas qu’un simple Turkish Star Wars. C’est surtout et avant tout une métaphore de l’Islam, voire un véritable pamphlet en faveur de cette religion. L’utilisation de la science-fiction n’est pas là pour cacher cet aspect religieux (car sinon, pourquoi y intégrer un speech explicite sur l’Islam?) mais au contraire pour faire comprendre simplement un message complexe (c’est la méthode qu’utilise aussi Jésus dans les Évangiles). Je ne dis pas pour autant que la réflexion de Cetin Inanç est particulièrement développée. Après tout, il ne fait qu’un copier-coller du Coran sans y apposer la moindre analyse. Mais celà donne un résultat autrement plus profond que le reste de sa filmographie.

On en vient donc naturellement à cette question: est-ce un film de propagande religieuse? J’en doute fortement. Le cinéma turque n’a jamais réellement eu une grande vocation à l’exportation. Le public visé est turque, donc quasi-unanimement musulman. Je vois mal Inanç vouloir convertir des musulmans à l’Islam. Par contre, celà lui permet de caresser son public dans le sens du poil, en flattant leur foi. Après tout, on n’attrape pas des mouches avec du vinaigre. Enfin, il est tout à fait possible que ce sujet tienne Inanç à coeur et que ce film soit pour lui une sorte de profession de foi. Et çà tombe bien car çà me permet de faire une subtile transition vers les convictions d’Inanç que dévoile ce film.

(Note: vu les réactions épidermiques que tout propos sur l’Islam engendre de nos jours, tant du côté de barbus intégristes qui n’ont rien compris à la religion qu’ils sont censés défendre que de celui de certains occidentaux tout aussi tarés qui déversent leur haine sur les musulmans en attendant de pouvoir «finir le travail» avec les juifs, je tiens à préciser que mon but n’est ici ni de manquer de respect à l’Islam ni d’en faire le prosélytisme. Je suis en athée passionné par les religions et n’ai pour objectif que de donner un éclairage nouveau sur ce que je considère comme le plus grand nanar de tous les temps.)


Un film progressiste:

Ceux qui ont eu la chance d’avoir vu Once Vatan et Korkusuz ont pu remarquer le fort nationalisme de Cetin Inanç. Film après film, ses héros défendent avec ardeur leur Turquie natale contre les hordes de grecs de l’ONU ou d’indépendantistes Kurdes. Dans Turkish Star Wars, la science-fiction limite grandement cet aspect. Mais elle n’en est pas pour autant absente. Ainsi, les deux sauveurs de l’humanité sont turques. On pourrait logiquement faire un rapprochement avec Independance Day: dans les deux cas, les héros qui sauvent l’humanité des méchants extraterrestres sont de la même nationalité que le spectateur lambda visé, ce qui flatte son patriotisme.

De même, le personnage musulman le plus cité dans le film n’est pas le prophète Mohammed mais un saint turque: Haci Bektasi Veli. C’était un des principaux acteurs de la conversion des turques à l’Islam, un peu comme saint Patrick pour les conversion des irlandais au Christianisme. Donc, on peut voir l’utilisation de l’Islam dans ce film comme un élément d’exaltation du patriotisme turque.

Et, souvent, le nationalisme pose sa vérité en s’opposant à ce qu’il considère comme étranger, extérieur, ennemi. L’image des asiatiques, des noirs africains et des «peaux-rouges» (s’agit-il d’amérindiens, d’indiens d’Inde, ou d’autres peuples?) est particulièrement révélatrice de ce fait. En effet, ils sont présentés sous des traits extrêmement caricaturaux. L’asiatique a une peau si jaune qu’un poussin en pâlirait, ses yeux sont si bridés qu’il ne s’agit en fait que de deux fentes, la longue natte et le costume chinois achevant cette grotesque image d’Épinal.

De même, le noir a dû se trouver en plein milieu d’incendies provençaux tant sa peau est sombre. Quant à ses lèvres, elles sont si rouges et si enflées qu’il a certainement embrassé un bouquet d’orties. Et surtout, ils font partie des monstres djinns et non pas des anges turques. Ils sont donc clairement présentés comme des êtres difformes et maléfiques, ennemis de l’humanité, qu’il s’agit de combattre pour préserver le bien. Ne connaissant pas personnellement Cetin Inanç, je ne me permettrai pas de le traiter de raciste, mais avouons que ces caricatures nauséabondes peuvent au mieux laisser planer le doute.

Quant à la place de la femme dans le cinéma d’Inanç, elle est à peine plus flatteuse. Certes, la blonde de Cüneyt fait partie des anges, mais son rôle se restreint à un vague sourire. Et il faut attendre que les trois quarts du films soient écoulés pour qu’elle prononce ses premiers mots. Et encore, elle est très vite interrompue par Cüneyt, qui semble plus pressé d’en découdre avec les djinns que d’écouter ce qu’elle a à lui dire. Quant à l’épouse du sorcier-Iblis, son seul rôle est celui de tentatrice à l’égard d’un Ali pas plus regardant que son compère. Et elle finit bien vite à l’état d’octopode, punie par son propre époux (une répudiation bien radicale).

L’une comme l’autre n’a pas la moindre utilité en termes narratifs, mais posent une image claire de ce que doit être une femme. La bonne est silencieuse, soumise et passive. La mauvaise est garce et tentatrice. Pour Inanç, tant la destruction que la sauvegarde de l’humanité est une affaire d’hommes, et pas n’importe lesquels.

Ne tombons pas pour autant dans les stéréotypes sur les pays musulmans. L’image de la femme n’est pas bien meilleure dans les pays occidentaux. Il suffit de voir tous ces rôles de potiches siliconées que l’on trouve dans les films américains pour s’en rendre compte. De plus, Inanç reprend de nombreux codes que l’on associe bien plus volontiers aux films occidentaux qu’à ceux du monde musulman: l’héroïne est blonde et la méchante brune, et le personnage d’Ali est avant tout celui d’un dragueur invétéré qui accumule les conquêtes. D’ailleurs, au début du film, Cüneyt n’hésite pas à lui dire:

Tu n’as qu’à lancer ton fameux coup de sifflet auquel aucune femme ne résiste.
Et Ali de s’empresser de siffler bien fort en espérant que les femmes vont accourir et l’entendant les siffler... Mais les relations entre les deux hommes ne se limite pas à un concours de qui traitera les femmes avec le plus de mépris. Car il y a une vraie amitié entre eux deux, ce que nous allons voir dans la dernière partie de cette analyse.


L’amitié virile selon Cüneyt:

Comme vous vous êtes montrés courageux de tout lire jusqu’ici (j’espère bien que c’est ce que vous avez fait), je ne vais pas y aller par quatre chemins dans cette dernière partie: le personnage d’Ali est l’archétype absolu du sidekick. Et comme tout bon sidekick, il sert de faire-valoir au personnage principal:

Ali: Ils ont peur de quelque chose mais ils s’occupent bien de nous.
Cüneyt: ils ne veulent pas que ta belle gueule soit abîmée.
Ali: Tu ne peux donc jamais être sérieux?
Cüneyt: Tu sais pourquoi la guerre atomique qui a presque détruit notre monde s’est déclenchée?
Ali: Pourquoi?
Cüneyt: Parce que les humains étaient trop sérieux. C’est souvent ennuyeux. Si ils avaient su rire un peu plus, ils auraient choisi la paix plutôt que la guerre.
Ali: Alors fais-moi rire, que cet enfer devienne un paradis.
(Il s’esclaffe, mais tous les figurants restent de marbre)
Ali: Rien n’a changé.
Cüneyt: Ca viendra...
Par contre, il est d’une fidélité à toute épreuve, tel un Lassie ou un Rintintin du Bosphore. Ainsi, capturé et entouré de tuyaux en caoutchouc et de diodes clignotantes, il résiste avec la plus grande fermeté aux tentatives de contrôle de son cerveau par le méchant sorcier:

Le Sorcier: Humain, en utilisant le pouvoir te ton cerveau, je deviendrais l’être le plus puissant.
Le robot: Nous n’arrivons pas à procéder au trasfert du cerveau de l’humain. Son cerveau n’est pas libre. Par ses schémas de pensée, sa volonté, son pouvoir, ce cerveau est programmée pour l’autre être humain. Cet humain est lié à son ami de tout son être. Nous ne pouvons nous emparer du pouvoir de son cerveau.
Le Sorcier: C’est impossible!
Le robot: Nous n’arrivons pas à nous emparer du pouvoir de son cerveau. Son cerveau n’estr pas libre. Sa pensée, sa volonté et le pouvoir de son cerveau sont programmés pour l’autre humain.
Le Sorcier: Il m’a trompé! Il m’a abusé cet homme de la Terre! Il a fait en sorte que son ami soit capturé en connaissance de cause et nous l’a abandonné.
Cette fidélité indéfectible ne semble malheureusement récompensé à sa juste valeur, vu comme Cüneyt semble pressé d’aller à son secours:

La capture d’Ali va me permettre de gagner du temps.
Devant tant d’injustice, Ali/Lassie va finir par craquer, reprochant à Cüneyt, qui a fini par venir le chercher, de trop prendre son temps (alors qu’il décanille des monstres par paquets de douze depuis une heure) et lui ravissant l’épée et le cerveau en or pour aller le remettre au sage... ce que Cüneyt avait justement l’intention de faire. Par de bol pour notre sidekick préféré, le sorcier avait pris l’apparence du sage et a ainsi pu toucher les deux objets, ce qui suffit à le rendre (presque) invincible. Cette bourde ne l’empêche pas de réitérer sa rébellion envers Cüneyt en fonçant dans un couloir qui explose à son passage, amenant au dialogue «je-fais-chialer-le-public-tout-entier» que j’ai déjà retranscris à la fin du résumé du film. Comme quoi, les deux seules fois qu’il a voulu voler de ses propres ailes, celà lui a coûté la vie et a failli détruire le monde. Il ne fait pas bon se prendre pour le héro quand on n’est qu’un simple sidekick en Turquie.


Dernière petite observation:

Je ne résiste pas à l’envie d’en rajouter une dernière petite couche, qui met particulièrement bien en valeur les différences culturelles entre le Bosphore et Hollywood. Autant les américains se refusent systématiquement à montrer la mort d’un enfant dans leurs films, à tel point que même Freddy Krueger, qui est censé massacrer tous les enfants d’Elm Street, ne s’attaque en fait qu’à des ados libidineux et boutonneux, autant les turques se lâchent complètement dans ce domaine pour nous montrer à quel point leur méchant est vraiment très méchant. On peut ainsi voir le robot en tôle secouer par la tête un gamin ensanglanté pendant que son père implore sa pitié. De même, l’attaque des momies dans les grottes se concentre surtout sur l’entassement de cadavres d’enfants hilares. Le seul qui survive, c’est le petit nerveux qui se fait constamment capturer par le sorcier en compagnie de la blonde muette.


Voilà. J’espère que ces éclaircissements scénaristiques vous auront aidés à mieux appréhender l’importance de ce chef d’oeuvre du septième art. Malgré mon ton sarcastique, je tiens à préciser que je suis sincère en en vantant les qualités. Malgré tous ses défauts, c’est un film qui sait retenir l’attention du téléspectateur: on ne s’ennuie pas un instant en regardant ce petit bijou. Et puis, çà fait tellement de bien de voir un film qui sort autant des sentiers battus du cinéma hollywoodien ultra-formaté...
Pouyss
Pouyss

Masculin Nombre de messages : 213
Age : 42
Date d'inscription : 27/03/2007

Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut


 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum